Ce matin là, River devait bien s'avouer que dans sa nuit perpétuelle elle y avait introduit un petit rayon de soleil. Un bref instant. Trop court mais elle n'arrivait plus vraiment à être elle même depuis... Depuis... Bref. Elle préférait ne même plus y penser. Par contre elle se félicitait bien de la petite blague qu'elle avait fait à une jeune fille de Serdaigle. Le cours était en commun et elle était juste derrière elle ce jour là. Une position rêvée pour une attaque dans les règles puisque c'était son tour. Nempêche, elle devait bien reconnaître qu'elle avait bien un fond de Serpentard en elle. S'il lui arrivait de douter de son orientation, c'était dans ces moments là qu'elle se sentait plus forte, moins vulnérable. Elle semblait pouvoir soudainement mieux contrôler son monde. Et ce matin là elle avait fait fort.

Le cours de potions était l’un de ses favoris car il demandait rigueur, concentration et attention ce qui l’obligeait à fermer son esprit à toute autre intrusion. Autrement dit, c’était le moment de la semaine où plus rien n’existait. Bon, le nouveau prof était pas trop mal mais ils avaient eu la chance d’avoir le professeur Rogue qui savait comment tenir sa classe à la perfection. Il leur avait au moins transmis ça excepté pour certains élèves qui avaient une fâcheuse tendance à rater leur potion. River n’en faisait heureusement pas partie. Pas qu’elle soit non plus la plus grande prêtresse de la potion, elle s’en sortait plutôt bien. Tout dépendait de la complexité et on pouvait dire que le niveau semblait avoir un peu baissé. Elle observait la couleur du chaudron de sa camarade qui prenait une bonne couleur. Et là l’occasion parfaite s’offrit à elle. La voisine de Myrabelle semblait avoir besoin d’aide au point que la serdaigle se détourna de son propre chaudron et se pencha sur celui de sa voisine en détresse. River observa aux alentours. Personne ne regardait. Et il se trouvait qu’elle avait justement un ingrédient très intéressant si on le mélangeait au reste. En plus de cette petite chose ci, là, devant elle, qui semblait l’appeler et lui crier quelque chose comme « Pitié, jettes nous dans son chaudron ! ». Cette petite voix l’implorait. Sa conscience la fit sourire, amusée par avance de ce qu’elle s’apprêtait à faire. Décidément non, elle ne pouvait pas résister à ça ! Elle attrapa deux trois ingrédients et dans un geste aussi rapide que précis, elle les jeta dans le chaudron de Myrabelle. Personne ne semblait avoir remarqué. Et ceux qui l’avait vu ne dirait sûrement rien… S’ils avaient la même envie de s’amuser que la jeune serpentarde.

Quand la serdaigle reporta son attention sur le chaudron, la couleur avait changé mais étant sûre d’elle, elle ajouta l’ingrédient de trop. Le chaudron se mit à bouillonner bien trop fort et avant que le professeur n’ait pu réagir il explosa, déversant le liquide sur la brunette. River eut le réflexe de s’éloigner avant, comme d’autres, notamment la voisine de Myrabelle. Le résultat fut impressionnant : ils virent bleuir les cheveux de la serdaigle. Jusque là, on respectait les couleurs de la maison. Cette pensée fit sourire River un bref instant. Elle n’avait pas visé les cheveux. Elle n’était pas censée les avoir bleus ! Oops… Si Myrabelle comprenait, elle penserait qu’elle l’avait fait exprès et pour le coup ça n’était pas le cas ! Et autre résultat attendu cette fois : sa peau était devenue orange. Comme si elle avait mis le mauvais autobronzant sur sa peau. River pensa que le teint carotte ne lui allait pas du tout. Elle s’était plus ou moins dissimulée dans la masse alors que les autres demandait si elle allait bien ou riait de sa nouvelle coiffure et de son teint particulier. Au moins, le cours était animé. Elle avait répondu à la dernière farce. Elle serait tranquille un moment désormais. Elle attaquait toujours au moment où sa camarade s’y attendait le moins, tout simplement pour jouer. Bon… Il faudrait envisager la possibilité de s’excuser pour les cheveux plus tard… Si elle découvre qu’elle en est l’origine évidemment ! Autrement… Elle omettrait cet incident bien volontairement, elle n’était pas stupide !

Et elles ne se croisèrent plus dans la journée. En septième année, il y avait beaucoup d’heures de libre consacrées à l’étude personnelle. Et la jeune serpentarde en profitait pour sortir s’aérer et rédiger ses notes dehors, dans le parc quand il faisait beau, ce qui était le cas. Le décor la changeait un peu des cachots lugubres et de la chambre où elle aimait se réfugier mais une pimbêche pleurait toutes les larmes de son corps parce que son… abruti l’avait laissé tomber. Tssss. Il fallait être vraiment idiote pour croire un… Garçon. Ils n’étaient rien d’autre que des brutes qui ne pensaient qu’à une chose. Elle avait été assez bête pour lui donner, qu’elle paye maintenant ! Bref, du coup elle avait dû sortir. Parce que ça la gonflait de voir le monde de rapace qui s’amenait pour soi disant « consoler » cette nulle. D’ailleurs River ne s’était pas privé pour dire ce qu’elle pensait :

- Tu es vraiment un troll des cavernes à pleurer pour un mec ma pauvre fille ! On se demande bien ce que tu fais ici…
- Hadfield, fous lui la paix ! On sait que t’es inhumaine, pas la peine de la ramener !
- L’inhumanité au moins ne me ridiculise pas. Vous voulez juste profiter de l’opportunité, jouir de sa faiblesse. C’est lâche. Je dégage mais si ce soir elle s’est pas calmée, elle restera dehors. J’ai pas envie de passer une nuit blanche pour une abrutie qui a cru en une chose aussi inutile et manifestement futile que… L’amour.

Elle était partie la tête haute dans un silence religieux mais entendit une fille chuchoter « Laisse tomber, c’est qu’une conne ». Même pas le courage de le lui dire en face. Ces filles ne valaient rien. Elle savait bien elle ce qui se passait vraiment maintenant. Il suffisait de voir comment elle avait failli y passer. Et comment son cousin se conduisait depuis ce jour là. Et les autres. Elle les avait observé. Tous les même. Non, le bonheur ne viendrait certainement pas d’un sac de testostérones immatures.

La salle commune était blindée. Etouffante. La bibliothèque l’endormait. La grande salle réunissait la plupart du temps les feignants. Le parc lui offrait au moins l’occasion de respirer un peu et de s’isoler si elle s’y prenait bien. Parce que des parasites essayaient encore de l’approcher malgré tout ce qu’elle avait déjà pu faire pour les éloigner. Finalement, elle trouva un petit coin au soleil lui permettant de voir les autres sans forcément être vraiment vue. Parfait. Elle s’y installa et commença à rédiger son devoir de potion. Alors qu’elle leva les yeux le temps de réfléchir à sa phrase elle vit une chose bleue et orange marcher à grand pas dans le parc. Elle reprit bien vite son écriture, ne sachant pas trop ce que cherchait Rachwood. Mieux valait jouer l’innocence… Mais les pas se rapprochaient alors... Elle leva la tête prête à affronter le courroux de sa camarade.

Elle esquissa un léger sourire.

- Salut! Est ce que tu vas mieux? C'était assez impressionnant !