La journée commençait si bien. Les rayons du soleil filtraient à travers les rideaux de velours rosés et les voilages blancs. C’était un merveilleux matin d’été. Une chaude journée qui s’annonçait. Oui, son inconscient se souvenait si bien de cette journée là. Un paradis sur Terre. Elle sentait les doux rayons réchauffer sa peau de porcelaine. Son esprit se réveillait lentement d’une nuit calme et reposante. Ses yeux s’ouvrirent sur la chambre à demi dans l’obscurité, éclairant le grand miroir encadré de dorures au dessus de la console où des fleurs s’épanouissaient dans un vase. Le marbre des murs, nacrés, donnait une impression de sérénité. Oui, ses yeux étaient toujours ravis par cette décoration. Elle se leva et replaça correctement sa chemise de nuit avant de se diriger vers la fenêtre pour observer le parc et le lac de leur propriété. Aucune trace de brume. Les oiseaux voletaient déjà. D’ailleurs, elle vit une petit mésange bleue se poser juste derrière sa fenêtre. Elle adorait quand ça se produisait. L’oiseau venait de s’envoler quand l’elfe de maison apparût dans la chambre. Il lui annonça que son bain était prêt. Toute sa vie était réglée comme du papier à musique. Elle hocha la tête et se dirigea vers le couloir. Elle ouvrit la porte et se retrouva dans la salle de bain où le bassin était prêt. L’eau exhalait des parfums sucrés qui lui procurèrent un bien être immédiat. Oui tout semblait parfaitement commencer pour cette nouvelle journée. Elle se glissa dans l’eau du bain et se relaxa quelques minutes.
Lorsqu’elle sortit, elle attrapa un drap de bain dans lequel elle s’enroula en frissonnant et rejoignit sa chambre. On avait déjà choisi pour elle la robe qu’elle porterait. Une robe blanche. Un cadeau de son cousin. Elle la trouvait franchement jolie. Elle s’habilla et finit de se préparer. Elle se rendit ensuite à la bibliothèque afin de travailler les exercices que lui avait donné son père. Elle était concentrée sur un livre philosophique quand soudain l’elfe de maison apparût devant elle :
- Miss Hadfield, votre cousin Monsieur Seth Hadfield vient d’arriver…Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase que le livre avait volé à travers la pièce et qu’elle était déjà dans l’escalier. Il couinait son nom pour une raison qu’elle ne comprit qu’en arrivant dans le salon. Alors qu’elle exultait de joie, elle se reçut l’effet d’une douche froide. Il n’était pas seul. Ses yeux tombèrent sur… Les images changèrent. C’était la fête de Noël que sa famille organisait. Quelque chose la poursuivait. Elle ne savait pas trop qui c’était ou plutôt ne voulait pas savoir. Le souvenir avait été bloqué par sa conscience mais le combat était engagé. Les images changeait sans cesse jusqu’à devenir sombres. Elle était immobilisée. Elle était seule, sans défense. Elle était faible. Elle… Se sentit suffoquer.
- Personne ne t’entendra. Personne ne viendra. Tu es mienne maintenant.
Elle pleurait. Elle était paralysée. Elle hurla.

Et ce fut son propre hurlement qui la réveilla. Elle était assise dans son lit, les cheveux complètement défaits. Le jour n’était même pas encore levé. En tous cas, aucun réveil n’avait encore laissé retentir leur sonnerie caractéristique. Où était-elle ? Sa respiration était saccadée et hachée alors qu’elle cherchait ses repères. Ce n’était pas chez elle. Son cerveau replaça ses souvenirs. Poudlard. Elle était à Poudlard. Les larmes ruissellaient toujours sur ses joues blanches. Elle entendit qu’on bougeait dans la chambre. Oh non ! Elle avait réveillé quelqu’un… Probablement Astoria vu la source du bruit.

- Désolée Astoria. Je… J’ai fait un mauvais rêve.

Elle n’en avait plus fait depuis un moment. A vrai dire, elle prenait souvent une potion sans rêve avant de s’endormir. Mais elle avait oublié la veille au soir à cause de ses révisions. Reprendre son self control. Elle essayait de toutes ses forces. Elle n’aimait pas paraître faible, sans défense. Elle avait tant fait pour se sortir de ce cercle vicieux pour qu’il revienne la hanter à nouveau.

C'était étrange comme son comportement était calqué sur un schémas rondement basé sur la défense... Lorsqu'elle était consciente, autrement dit le jour, jamais ces images ne lui revenaient en tête. Elles étaient bloquées, oubliées, coincées dans son inconscient parce que y penser lui faisait mal. Elle n'aimait pas ne pas contrôler ce qui se passait autour d'elle. Elle n'aimait pas se sentir aculée, être une proie, une victime, bref faible. C'était insupportable. Vraiment insupportable. Se sentir démunie était une chose inconcevable. Alors elle avait construit une muraille autour de son cœur pour ne plus jamais souffrir. Elle avait finalement compris pourquoi les sentiments pouvaient être dangereux : ils pouvaient vous forcer à foutre votre vie en l’air pour rien du tout. Pour tout gâcher. Et elle ne voulait pas la gâcher. Au contraire, elle voulait trouver sa vie et simplement vivre selon ses envies et ses valeurs. Des valeurs qu’on lui avait certes transmises mais qui lui semblaient justes. Elle voulait faire sa place dans ce monde et l’influencer de la meilleure manière possible. Pour cela, il fallait trouver le moyen d’influencer ceux qui avaient le pouvoir. Actuellement, ceux qui tournaient autour d’elle et qui avaient ce pouvoir n’étaient pas franchement des lumières car ils reproduisaient sans cesse les mêmes erreurs. Oh oui, elle avait étudié, elle avait bien étudié et savait désormais comment il fallait être pour réussir sa vie. Et elle comptait bien mettre en pratique le résultat de ses recherches. Elle parviendrait un jour à ses fins. Elle ignorait juste encore comment.

Astoria devait probablement être très agacée d’avoir été réveillé comme ça. River s’en voulait. En fait c’était carrément ridicule de se mettre dans un tel état pour un simple mauvais rêve et qu’en plus les autres s’en rendent compte. Humiliant. Ils allaient peut être vouloir savoir de quoi il s’agissait en espérant découvrir une faiblesse sur laquelle ils pourraient appuyer, donner des coups jusqu’à ce que le désespoir ne soit plus que le seul mot rythmant le quotidien. Certains élèves malheureusement vivaient ce type de quotidien entre brimades, humiliations et insultes. Même si elle était de sang pur, la jeune fille n’avait jamais pris parti dans ce type de rassemblement. Il était tellement simple à plusieurs de s’en prendre à une personne mais une fois seuls, ces mêmes individus se révélaient faibles. River n’avait pas besoin des autres pour envoyer balader ceux qui la gênaient. En cela était sa force. Et probablement le pourquoi du pourquoi on l’admirait dans une certaine mesure. Elle ne dépendait pas des autres. Elle semblait presque détachée et les relations restaient superficielles car elle mettait une barrière sur elle-même. Vous pouviez lui parler de vous, au contraire, c’était même le mieux car alors vous finissiez par lui révéler des choses sans le vouloir mais qui pouvaient un jour lui servir. Si vous la questionniez sur elle, elle ne faisait que répondre évasivement. Elle n’aimait pas parler de sa vie privée. Astoria grommela un « pas grave ». Bon. C’était toujours ça de gagné. Parce qu’ Astoria devait bien être celle dont elle craignait les colères. Aussi surprenant que cela pouvait paraître, River devait bien s’avouer qu’elle tenait à Astoria. Toutes les deux allaient devoir affronter le même destin. Rien que cette raison suffisait à adoucir River ou au moins à être un peu plus sociable avec la jeune fille. Et puis, elle ne l’ennuyait jamais côté garçon vu qu’elle ne sortait jamais avec les garçons. Qui pouvait sincèrement prétendre avoir un droit sur elle ? Personne. En dehors de Lui. Merlin ce que c’était humiliant ! Parfois, elle avait envie de se frotter jusqu’à s’en arracher la peau. Elle se sentait désarmé quand elle se retrouvait en face de lui et ne savait plus comment réagir. Les choses étaient passées hors de contrôle. Elle détestait perdre le contrôle. Alors quand elle entendit Astoria chuchoter le sort qui lui permettait d’éclairer ses pas jusqu’à son lit. River eut un tremblement mais ferma un instant les yeux comme pour se convaincre qu’il n’y avait aucun danger, c’était une fille qui venait. Une fille. Pas de danger.

- Et bien, en tout cas, ce cauchemar t'a chamboulée, tu as vue comme tu transpire? Et tu as un teint livide ma belle !
River la regarda. En temps normal, elle aurait répliqué acerbement mais là elle était en état de choc. Alors… La seule chose qui lui faisait envie, c’était d’avoir un soutien. Un vrai soutien. Elle se jeta sur Astoria et s’agrippa à elle avant de laisser ses larmes couler.

- Je suis désolée, répéta-t-elle comme une litanie.

Merlin, parfois, être proche de quelqu’un était si rassurant.

- C’était tellement effrayant, ça semblait tellement réel ! Je suis désolée de t’avoir réveiller, c’est tellement idiot en plus !

Autant dire que ce type de scène était d’une rareté étonnante. Fragile. Elle se sentait vulnérable. Si vulnérable. Elle n’aimait pas ça.